Définir un concept est une tâche ardue, particulièrement lorsqu’il s’agit d’un concept universel dont la définition ne fait pas consensus dû à ses multiples facettes. L’amour, par exemple, possède tout autant de significations que de personnes qui tenteront de l’expliquer. Chacun·e en a sa propre perception et opinion. C’est exactement ce que met en lumière le nouveau collectif dirigé par Marilyse Hamelin, 15 brefs essais sur l’amour. Ses quatorze invité·e·s, issu·e·s de différents milieux, se sont fait attribuer la tâche ardue de décortiquer le terme « amour » afin d’en trouver un sens. En se penchant sur cette mission, plusieurs d’entre elleux se sont remis·e·s en question. Cela a mené à des réflexions intimes au sujet, entre autres, de l’orientation sexuelle, du célibat, de la parentalité et de l’amitié. Celles-ci illustrent que les formes que peut prendre l’amour sont innombrables.
Le collectif donne ainsi une vision de l’amour au sens large, même s’il aurait certainement encore été possible d’ajouter une multitude d’essais abordant d’autres rapports de nature affective. Les diverses perspectives de l’amour donnent le ton des essais, témoignant de visions à la fois humoristiques, psychologiques, sociologiques, mathématiques et linguistiques.
Dans son texte, Marilyse Hamelin introduit la thématique du collectif : la recherche du sens de l’amour, son exploration sous toutes ses coutures. Les 15 essais tentent tant bien que mal de chercher un sens à ce sentiment qui semble impossible à circonscrire. La journaliste, diplômée de l’UQAM, explique comment, encore aujourd’hui, l’amour est trop souvent associé à la féminité. Malgré ses efforts, les essais de son ouvrage ont donc été rédigés par une majorité de femmes. Il est étonnant de voir à quel point les stéréotypes entrainent encore à ce jour une vision genrée du concept, quoique l’essai de Raphaëlle Corbeil soutienne justement ce déséquilibre amoureux chez l’homme et la femme. Julien Gravelle est le seul homme à avoir proposé une réflexion sur le sujet. Il va au-delà de la relation amoureuse et s’exprime plutôt sur le fort lien qu’il est possible de développer avec ses animaux de compagnie.
Une pensée féministe fait son chemin dans le collectif, laissant apparaitre des critiques de l’hétérosexualité, de la monogamie et de la parentalité. La majorité des essais dénoncent l’idéalisation de l’amour et du couple. Celui de Carmélie Jacob, chargée de cours à l’UQAM, porte d’ailleurs sur l’attente du couple, surtout à partir d’un certain âge. La présence d’un « significant other » est souvent présumée comme étant essentielle et met une certaine pression à se mettre en couple. Le célibat est-il si négatif ? Les réponses font consensus dans le collectif : tout passe d’abord par l’amour de soi.
C’est cet amour propre qui inspire le manifeste de la comédienne Mylène Mackay. Elle prend appui sur le Refus global, un manifeste artistique québécois, pour militer en faveur de l’amour sain. Elle y dresse une liste de red flags afin de mettre les lecteur·rice·s en garde contre les relations malsaines – ou la masculinité toxique en général. Plusieurs auteur·rice·s soulignent d’ailleurs l’inégalité entre l’homme et la femme en amour, surtout causée par l’hétérosexisme et le patriarcat dans notre société.
Bref, 15 brefs essais sur l’amour est une ode à tous les aspects du sentiment amoureux. Le collectif rend explicite le fait qu’il n’est pas nécessaire d’avoir trouvé l’amour avec un grand A, le ou la seul·e et unique partenaire, l’âme sœur, la douce moitié pour avoir accès au bonheur. Si l’amour est vital, c’est qu’il nous entoure plus que nous ne pouvons l’imaginer.
Avec sa sortie en librairie prévue le 14 février, le collectif est le meilleur moyen d’être reconnaissant·e pour tout l’amour que nous recevons au quotidien, peu importe la forme qu’il prend.
Hamelin, Marilyse (dir), 15 brefs essais sur l’amour : petits et grands chantiers de reconstruction, Montréal, Somme toute, coll. « brefs essais », 2023, 146p.