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17-04-2025 Vol 19

Le retour d’Aphex Twin. Syro de Richard D. James

Richard D. James, alias Aphex Twin, aura pris 4748 jours pour sortir son premier projet sous ce pseudonyme depuis l’infâme Drukqs (2001). Celui que plusieurs considèrent comme le père de la musique électronique moderne nous offre sans aucun doute son œuvre la plus accessible. Syro est définitivement son disque le plus abouti, mêlant la complexité et la nostalgie assumée des années 1990.

Dans la forme, Syro est conçu sur un modèle plus raisonné, calculé. James a opté pour une approche alternative où il respecte une ligne directrice durant ses 12 pièces. Caractérisé par l’absence de déséquilibre musical, Aphex Twin fait soigneusement revivre ses origines électroniques. Syro est authentique au style perfectionné par le compositeur irlandais: une affirmation de la maitrise de son genre.

Ce qui frappe, initialement, c’est l’axe de l’album orienté vers la découverte du monde particulier de James. L’œuvre merveilleusement mixée se définit par la cohérence de ses lignes de basses, des ses mélodies sophistiquées et par son rythme accéléré. Syro offre un voyage dans le détail, expérience procurée par le génie d’Aphex Twin. L’artiste s’est même permis d’ajouter quelques incompréhensibles partitions vocales, une bricole qu’il n’a que très rarement inclus dans ses productions antérieures. Flirtant avec des sonorités néo-jazz et les atmosphères technos teintées d’influences funk, l’esthétique de l’album repose particulièrement dans le souci de magnanimité et de grandeur.  L’album est opaque sans être étouffant. Les initiés s’y retrouveront facilement alors que les nouveaux venus pourront s’y perdre avec plaisir.

Aphex Twin
Courtoisie Aphex Twin

La puissance de Syro réside dans l’originalité de son traitement des sons. Le créateur a utilisé plus de 70 instruments, dont plusieurs d’une autre époque: mélangeurs, synthétiseurs, logiciels, boîtes à rythmes et autres compresseurs. Fait étrange: la liste de tous les outils utilisés ainsi que le coût total de l’album est inscrite à l’intérieur de l’album. Selon Ian Anderson, responsable de la conception visuelle de Syro, la diffusion de cette liste raconte à l’auditeur tout et rien à propos de sa création qui se veut probablement son accomplissement le plus personnel, comme le témoigne la dernière portion (Aisatasana 102) de l’album. Pièce composée uniquement d’une magnifique mélodie au piano avec le chant des oiseaux en arrière-plan, rappelant vaguement sa plus que copiée pièce April 14th. Dans les faits, Syro reste l’œuvre d’un homme mystérieux, œuvrant seul dans un monde qui, désormais, lui appartient. Sans surestimer quoi que ce soit, Aphex Twin nous offre un splendide retour – avec plus à venir.

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Syro, de Richard D. James, est en vente sur iTunes depuis le 22 septembre 2014.
L’album intégral est disponible en écoute libre ici.

Article par Julien Denis.

Artichaut magazine

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