À l’automne dernier, Yves D. Poirier publiait sa première œuvre policière chez Fides. Son protagoniste, Hubert Quentin, est un veuf septuagénaire qui habite seul dans son manoir en Montérégie. Le roman s’ouvre sur une multitude de scénarios imaginés par ce vieil homme qui vient de se faire flouer par un arnaqueur. Ce sont plus de 1,4 million de dollars qui lui ont été dérobés par cet escroc, à qui Hubert avait confié ses épargnes. Ce n’est toutefois pas le seul à s’être fait prendre ni le seul à vouloir crier vengeance. L’homme passe d’ailleurs près de s’enlever la vie, découragé par cet événement qui survient peu de temps après le décès de sa femme, pour laquelle il vouait un grand amour.
Alors qu’il est incapable d’appuyer sur la gâchette et se ressasse mille et un scénarios pour se débarrasser de ce charlatan, une infirmière, Fanny, ressemblant de près à sa défunte femme, vient sonner chez Hubert, mettant un frein à tous ses plans. Ce dernier s’entiche immédiatement de cette femme, qui lui redonne d’ailleurs de l’inspiration pour l’écriture d’une histoire après plusieurs mois de pages blanches. Il se met donc à écrire un scénario dans lequel il n’est nul autre que le protagoniste. Il devient alors très difficile de différencier la narration du livre de celle du scénario puisque les deux se suivent en parallèle, racontant la vie d’Hubert Quentin. Impossible de savoir, à ce moment, si nous pouvons nous fier à ce que raconte le scénariste.Il joue effectivement aisément avec les détails, prévoit les événements et change ainsi le cours de l’histoire. Cela en fait un protagoniste un peu détestable, il est arrogant, semble avoir réponse à tout même lorsqu’on le soupçonne d’être le responsable de la disparition de son fraudeur.
Cette intrigue entremêle donc une fiction écrite par Yves D. Poirier et celle imaginée par son protagoniste Hubert Quentin pour son scénario. Tout au long, nous ne pouvons nous empêcher de nous aussi soupçonner quelques personnages qui ne semblent pas blancs comme neige. Heureusement, le dénouement répond à toutes nos questions, mettant ainsi fin à nos nombreux questionnements. Par ailleurs, les amateur·rice·s de cinéma apprécieront sans doute les nombreuses références cinématographiques auxquelles Hubert a recours, notamment pour donner des exemples de ce qu’il avance.
Poirier, D. Yves, Le scénariste, Montréal, Fides, 2023, 204p.