Le choix de la maternité est un débat incessant dans la société actuelle. La montée de la pensée féministe encourage les femmes à se questionner sur leur volonté à devenir mères. En effet, celle-ci soutient que la grossesse est un choix et non une obligation. Malgré la promotion de cette idée, le jugement auquel font face les femmes nullipares reste omniprésent, et que dire de l’indignation devant les femmes qui annoncent leur ligature des trompes de Fallope. Pourtant, il ne faut pas négliger que certaines femmes ressentent l’appel de la maternité au tréfonds de leurs entrailles alors que d’autres ne se voient pas endosser ce rôle pour de multiples raisons. D’autres encore décident d’ouvrir les bras à la maternité sans avoir elles-mêmes enfanté.
Les éditions XYZ ont récemment publié le roman graphique Je pense que j’en aurai pas de Catherine Gauthier. La protagoniste, qui atteint ses 37 ans, fait face à de nombreux questionnements alors que son horloge biologique lui indique que sa fertilité diminue grandement de jour en jour. Elle semble avoir pris la décision de ne pas avoir d’enfants, mais la pression que son entourage lui fait ressentir la pousse à se remettre sans cesse en question. Elle illustre que le rôle de mère a longtemps été imposé aux femmes par l’Église. En effet, la procréation – en grande partie – était une vocation, un devoir auquel elles ne pouvaient renoncer. Les pensées ont beaucoup évolué depuis. Cependant, cette pression à la maternité reste ancrée dans la pensée populaire. Une femme est-elle réellement accomplie sans enfants ? Bien sûr que oui, la femme est d’ailleurs libre de choisir ce qu’elle fait de son corps et de sa vie.
Dans le roman graphique, aux illustrations si réalistes qu’on croirait à la photographie, l’autrice fait ressortir les nombreux sacrifices que représente le choix de la maternité. Catherine Gauthier évoque l’image de la vie parfaite telle qu’elle est représentée : les études, un bon emploi, un mari, une maison, des bébés. Pourtant, cela ne ressemble pas au parcours de la grande majorité des gens. L’autrice illustre d’ailleurs qu’une trajectoire peut être modifiée rapidement, de manière imprévisible. Elle le démontre en brossant le portrait de cinq femmes qui ont décidé, pour une raison ou pour une autre, de ne pas enfanter. Cela met en lumière l’importance du contexte : le partenaire, le célibat, la santé mentale, la fertilité. On peut choisir de décliner la maternité, comme on peut choisir de devenir mère autrement. L’autrice soutient, de manière bienveillante, que le rôle de mère ne devrait pas définir la femme.
D’ailleurs, dans un monde où le crime, la guerre, la maladie, les enjeux environnementaux et les enjeux monétaires sont suspendus au-dessus de nos têtes comme une épée de Damoclès, la volonté d’avoir des enfants a de quoi être murement réfléchie.
Gauthier, Catherine, Je pense que j’en aurai pas, Montréal, XYZ, coll. « Quai n˚5 », 2023, 136 p.