Lili Boisvert, connue pour son essai féministe Le principe du cumshot, a récemment publié un roman percutant : Match. Ce dernier raconte l’histoire d’Émilie, qui se retrouve coincée dans une relation toxique. Le récit débute par une pratique commune chez les jeunes adultes : l’utilisation d’une application de rencontre. Émilie vogue entre ses matchs, allant en date avec des hommes charmants… Du moins, c’est ce qu’elle pense au départ. Elle s’entiche de Ludwig, qui lui laisse une première impression douteuse, mais intrigante. C’est alors que s’entame une relation toxique cauchemardesque dans laquelle Émilie subit de la violence psychologique.
La nouvelle œuvre de Lili Boisvert a provoqué une multitude d’émotions chez moi. La plume de l’autrice permet de ressentir l’humiliation, la peur et le chagrin que vit la protagoniste. La colère demeure toutefois l’émotion qui s’est logée en moi tout au long de ma lecture. À quelques reprises, la féministe que je suis a voulu jeter le livre au bout de ses bras, n’en revenant pas de l’injustice à laquelle faisait face Émilie. L’autrice a su démontrer avec tact les réalités de la violence psychologique. En effet, la protagoniste se retrouve coincée dans un cercle vicieux (duquel on aimerait pouvoir la sortir) : Ludwig joue avec sa tête, l’insultant un instant, puis étant l’homme le plus attentionné le moment suivant. Émilie se retrouve captive du sempiternel cycle de violence, fluctuant entre la tension et la lune de miel. La protagoniste, une femme forte, se retrouve isolée et sans aucune confiance en elle. Elle est prête à porter le blâme pour tout, même lorsqu’elle ne peut être la cause du problème.
Avec Match, Lili Boisvert démontre que même une femme indépendante, une femme féministe, une femme qui n’a jamais craint de se prononcer ou de tenir tête à quelqu’un·e, peut se retrouver dans cette situation. Match est un roman poignant, frustrant et affligeant à la fois. Il illustre l’emprise que peuvent avoir les agresseur·euse·s à l’aide de la manipulation. Les propos de l’autrice m’ont touchée : « Quand on est enlisé dans les sables mouvants, il paraît que le plus sûr, c’est de ne pas bouger et d’attendre les secours. Sauf qu’il n’y avait personne pour me tirer de là : je n’avais dit à personne où je m’étais rendue. Je m’étais cachée dans ma vie[1]. » En somme, l’autrice a su écrire de manière très respectueuse sur le sujet. Elle a à la fois déconstruit les préjugés et donné de la visibilité aux signes avant-coureurs de la violence conjugale, permettant ainsi une forme de prévention.
[1] Lili Boisvert, Match, Montréal, VLB Éditeur, 2022, p. 151.
***
Boisvert, Lili, Match, Montréal, VLB Éditeur, 2022, 192 p.
Autrice : Mégane Therrien
SOS violence conjugale : 1 800 363‑9010