La dessinatrice et autrice Mirion Malle s’allie avec les éditions Pow Pow pour une seconde fois avec sa plus récente bande dessinée : Adieu triste amour, publiée en mai dernier. L’œuvre débute par ailleurs avec la citation : « Depuis que j’ai disparu, tout me semble plus doux, plus facile », ce qui se veut un clin d’œil à sa bande dessinée précédente : C’est comme ça que je disparais. L’artiste donne donc, dès les premières pages, le statut à le·la lecteur·rice de confident·e, d’un·e ami·e à qui elle donne des nouvelles pour rattraper le temps perdu. Un véritable cocon d’intimité se crée au fil du récit.
Le livre met en scène Cléo, une jeune dessinatrice et autrice de bande dessinée française qui vit maintenant à Montréal. De passage en France pour un salon du livre, elle apprend que son copain a eu des comportements déplacés envers une femme alors qu’il et elle étaient étudiant·e·s. Cette dernière porte finalement plainte à la direction et il doit alors lui présenter des excuses. Il continue toutefois de l’insulter et, n’en pouvant plus, elle décide de quitter l’école. Alors que Cléo tente de confronter Charles à ce sujet, il lui répond constamment que cette histoire est fausse, qu’il ne faisait que draguer maladroitement et qu’elle a exagéré les faits. Ses réponses – avec le ton qu’il prend lorsqu’il et elle en discutent – ne lui plaisent pas et remettent en doute sa confiance. Elle décide de le quitter.
Adieu triste amour rend compte de la complexité des relations amoureuses hétérosexuelles qui pèsent majoritairement sur les femmes en raison de l’inégalité des pouvoirs, comme l’appuie Mona Chollet dans Réinventer l’amour : Comment le patriarcat sabote les relations hétérosexuelles. Le harcèlement sexuel est souvent minimisé et considéré comme de la simple persévérance de la part d’un homme pour attirer l’attention d’une femme, dès lors, les répercussions sont moindres pour l’harceleur, voire parfois inexistantes. Il est donc fort possible qu’une femme ne soit pas au courant de ce passé grave d’un partenaire amoureux. Mirion Malle illustre cette toxicité dans son livre, mais elle mise plutôt sur ce qu’il y a de beau : la relation de confiance et le désir de protection que les femmes développent les unes pour les autres. Elle met en l’avant l’amitié, l’importance de l’écoute et de l’ouverture et montre qu’il s’agit d’éléments clés pour passer à travers les ruptures et les évènements difficiles. Elle ne minimise toutefois pas l’importance de prendre ses propres décisions et de prendre soins de soi, en s’évadant à la campagne s’il le faut par exemple. Le récit qu’elle offre est haut en émotions, mais aussi réconfortant et laisse le·la lecteur·rice sur un doux sentiment, une sorte de quiétude. Il est difficile de poser le livre, car les mots coulent tranquillement et l’on ne peut que se laisser porter par le mouvement.
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Malle, Mirion, Adieu triste amour, Montréal, Pow pow, 2022.
Autrice : Eve Lemieux-Cloutier