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17-04-2025 Vol 19

La relève sera electro ou ne sera pas. Sélection Franco de M pour Montréal

Connaissez-vous notre relève musicale francophone? Elle est pourtant bien présente, plus créative que jamais et dans un virage electro assumé. Le festival M pour Montréal a présenté samedi dernier six artistes émergents dans le cadre de son concert Franco M, dont Pierre Kwenders et Safia Nolin. Retour sur une soirée – ou plutôt, un après-midi – riche en découvertes.

Le Café Campus était utilisé à son plein potentiel alors que les groupes se produisaient en alternance sur les deux scènes de l’établissement. Dès 14 heures, quelques dizaines de personnes s’étaient déjà rassemblées dans la plus petite des deux salles pour ce sprint matinal de six performances de trente minutes chacune.

C’est Bronswick, le duo composé de Catherine Coutu et de Bertrand Pouyet, qui a ouvert le bal. Multi-instrumentistes, ils chantent, jouent du clavier et programment des beats. Leur electro-pop est légère, rêveuse, et la voix douce de Coutu rappelle un peu celle de Bronwyn Griffin d’Electric Youth. La foule, d’abord timide, s’est un peu dégourdie à partir de la deuxième chanson. Un peu gêné, le duo ne trouvait pas les mots pour interagir avec le public, se contentant de les remercier de leur présence dans les deux langues officielles. Ce sera intéressant de les voir évoluer, car ils réussissent sur le fond; il ne reste qu’à travailler la forme.

Bronswick. Crédit photographique: Bruno Destombes
Bronswick. Crédit photographique: Bruno Destombes

Laurence Nerbonne a poursuivi cette journée electro avec son nouveau projet solo. L’ancienne leader d’Hôtel Morphée s’est dite très heureuse de venir «casser» quelques-unes de ses plus récentes compositions sur scène. La musique est entraînante, «tropicale» aux dires de la chanteuse, et livrée efficacement. Nerbonne a conclu sa prestation dynamique avec son single «Rêves d’été», paru en juin, après avoir convié le public à son lancement d’album en 2016. À suivre.

Trois synthétiseurs devant lesquels sont placés trois micros: c’est en parfaites symétrie et symbiose que Paupière a présenté un aperçu de son univers. Les basses sont fortes, les voix sont vaporeuses et les mélodies sont simples mais originales. On y retrouve certainement une influence rétro des années 80 bien que leurs compositions soient diversifiées.

Les deux exceptions qui confirment la règle

Des six artistes présents, seuls Philippe Brach et Safia Nolin ne versent pas dans la musique électronique. Brach a fait une entrée remarquée dans la grande salle du Campus. Masqué et sans chaussures, il a entonné un chant étrange sur des basses tonitruantes avant d’enchaîner avec «Né pour être sauvage», tiré de son nouvel album Portraits de famine. Son style est bien particulier, pas étonnant qu’il fasse autant parler de lui; sa musique éclatée se situe quelque part entre le folk, le rock psychédélique et le grunge.

Philippe Brach. Crédit photographique: Bruno Destombes
Philippe Brach. Crédit photographique: Bruno Destombes

Bière à la main, bien qu’il soit seulement 3 heures de l’après-midi, Philippe Brach s’est gentiment moqué de la foule trop silencieuse à son goût en ponctuant ses interventions de rires en canne et d’applaudissements. Il a tout de même semblé apprécier l’expérience de «show matinal». Il est en pleine ascension, on le reverra bientôt.

Safia Nolin, quant à elle, a bercé le public avec sa voix envoûtante. Accompagnée du guitariste et chanteur Joseph Marchand, elle a livré une performance intime et authentique. Une petite pause de beat bienvenue, quoi que les tests de son à l’étage au-dessus ont un peu perturbé l’atmosphère paisible. La chanteuse folk de Québec a joué quelques pièces de son dernier album Limoilou, sorti en septembre, dont la pièce «Noël partout», qu’elle a présenté ainsi: «Je suis désolée, je vais jouer une toune de Noël. Ben oui, je le sais, tout le monde haït ça Noël ! [rires]». Nolin a été l’une des favorites de la journée à en juger par les acclamations du public.

Le meilleur pour la fin

Pierre Kwenders, ça vous dit quelque chose ? Ce sera bientôt le cas sinon. Le montréalais originaire du Congo a conclu la journée avec brio. Confiant et intense sur scène, il a su instaurer une ambiance festive et a enfin fait danser cette foule tranquille. Le party a véritablement pris son envol sur la chanson Mardi Gras, puis Kwenders a redoublé d’ardeur sur l’hyper-accrocheuse Popolipo qui pourrait bien jouer dans tous les clubs.

Pierre Kwenders. Crédit photographique: Bruno Destombes
Pierre Kwenders. Crédit photographique: Bruno Destombes

«PK» se fait remarquer par sa world music parfaitement intégrée à l’electro. Kwenders est issu d’une culture riche et cela s’entend. Il se démarque fortement avec son style singulier. Ce fut sans aucun doute la plus belle surprise de la journée. Et il n’y a pas que les jeunes, présents en majorité dans la salle, qui ont apprécié ; quelques quinquagénaires se sont déhanchés eux aussi durant toutes les pièces. Le spectacle s’est terminé avec un chant à répondre avec la foule sur «Let It Play», chant qui résonnait encore sur la rue Prince-Arthur à la fin du concert.

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Le spectacle Franco M, qui en était à sa 6e édition, a été présenté au Café Campus le 21 novembre, dans le cadre du festival M pour Montréal.
Pour découvrir les artistes :
Bronswick — EP Errances
Philippe Brach — Portraits de famine
Safia Nolin — Limoilou
Laurence Nerbonne — Rêves d’été (single)
Paupière — Cinq heures (single)
Pierre Kwenders — Le dernier empereur bantou

Article par Philippe Lemelin. Étudiant en journalisme et musicien, passionné de cinéma et d’art en général, curieux de nature et friand de nouvelles découvertes.

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