En travaillant à l’élaboration de Concerto au sol, Félix Boisvert s’était donné la mission de faire voir la musique et d’ouvrir les oreilles de ses spectateurs. En voyant (ou plutôt en entendant) le résultat de sa démarche, on ne peut que conclure à la réussite la plus complète de son projet. Ça n’aura pas été en vain qu’il aura travaillé pendant 8 ans à la création de ce spectacle qui saura plaire à un public très large, qu’il soit initié ou pas aux arcanes du spectacle vivant. Jeunes et vieux devraient sérieusement se bousculer pour voir ce « tout à entendre », comme le présente lui-même son créateur.
Dès les premiers instants, alors que les projecteurs font place à l’éclairage de la lune, on se sent dans un film d’animation de l’ONF. La même atmosphère de découverte, d’expérimentation heureuse, se diffuse dans la petite salle des Écuries. Félix Boisvert, maître d’oeuvre, prend place dans la boîte noire qui lui servira de scène tout au long du spectacle. D’un jeu typé, grossi, il salue son public avant de s’installer derrière l’écran semi-transparent qui lui permettra de laisser la vedette à son petit personnage bleu. Dès lors, la présence de l’homme s’effacera presque entièrement derrière celle de sa main-marionnette, vedette de ce spectacle. On plonge alors dans un univers sonore extrêmement élaboré, aussi riche que pourraient l’être les meilleures scénographies.
En compagnie du petit bonhomme bleu, le public part à la découverte de la musique et des sons, dans un formidable voyage d’une heure. Dans ce qui s’apparente à une quête existentielle, le petit héros devra trouver son ton, sa sonorité. L’affaire ne se fera pas sans heurts puisque les rencontres avec les autres mains-instruments sont parfois brutales. Surtout lorsque l’on n’a pas encore trouvé le moyen de communiquer avec eux. Les animations d’une grande beauté se multiplient ainsi autour de la marionnette. Les sons, d’abord échos étranges, parfois déstabilisants, vont se préciser au fil du voyage pour devenir musiques. L’aspect visuel s’estompe pour laisser de plus en plus de place à l’écoute qui se fait bientôt totale. Des portes s’ouvrent et se referment comme autant de genres musicaux à explorer.
Plus qu’un hommage à la musique, Concerto au sol est une danse magnifique. Sa réussite réside dans le talent qu’a le compositeur électroacoustique à cacher l’ampleur de la technique qui compose son spectacle pour en faire une aventure enchantée au cœur du son. La tentation de mettre en valeur ces artifices était pourtant grande. Félix Boisvert a su l’éviter et oser une production en apparence très simple. Et c’est cette simplicité, cet amour profond de la musique qui est finalement placé à l’avant-scène, pour notre plus grand bonheur. On en sort émerveillé, les sens décuplés par l’expérience. Si la musique a réellement un corps, elle a certainement trouvé son danseur.
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Concerto au sol de Félix Boisvert, présenté du 15 au 26 octobre au théâtre Aux Écuries. M.E.S. Félix Boisvert et Jean-François Boisvert, avec la collaboration de Karina Bleau.
Lisez également l’entrevue réalisée par l’Artichaut avec Félix Boisvert.
Ce spectacle participe au programme Carte Prem1ères, leurs abonnés bénéficient d’un rabais de 50 % sur le prix de leur billet durant la première semaine de représentations.Abonnez-vous et soutenez le théâtre émergent!