Un festival de films conçus pour la réalité virtuelle Oculus a pris place au Centre Phi, du 1er au 3 octobre, dans le cadre de l’événement MUTEK_IMG.
Kaléidoscope est en fait un festival du film itinérant, originaire de San Francisco, qui célèbre l’art visuel en faisant uniquement usage de la technologie Oculus. Divisée en trois sections distinctes (documentaire, animation et expérimentale), l’exposition gratuite offrait au public de faire l’expérience d’une immersion visuelle et auditive à travers plusieurs courts-métrages.
«En réalité, le casque dupe le cerveau en envoyant une image unique à chaque œil, ce qui crée l’effet de vision à l’infini», explique Lucie Jourdain, préposée lors de l’évènement. «Techniquement, il y a plusieurs capteurs qui reconnaissent le mouvement de la tête. C’est ce qui permet au logiciel de s’adapter en temps réel», ajoute-t-elle. La différence avec l’effet 3D utilisé dans une variété de productions cinématographiques, c’est qu’Oculus n’offre aucun contact avec le milieu d’origine. Cette technologie offre la liberté d’analyser tous les détails d’une œuvre. Or, malgré la grande force de cet aspect, cette liberté peut devenir une pure distraction, le propos initial échappant aux participants.

Parmi les autres œuvres présentées, la production d’animation en temps réel Colosse de Joseph Chen plonge le spectateur dans un univers féerique où l’on suit un jeune chasseur Inuit à la poursuite d’un golem de glace. Un court-métrage de 4 minutes 40 secondes durant lequel l’artiste exploite assez bien les capacités de cette nouvelle technologie, avec des tonnes de couleurs et de formes réparties dans une animation linéaire simple, mais efficace. Les graphiques d’Oculus desservent très bien le monde de l’animation.
Cela dit, le projet le plus marquant est probablement celui de Mac Cauley, qui a littéralement recréé l’univers de l’artiste Vincent Van Gogh où l’on peut évoluer et se déplacer dans l’intimité d’un café que fréquentait le peintre Hollandais. Il est donc possible d’échanger un contact visuel avec le barista qui réagit à nos mouvements et à notre présence, ou même avec Van Gogh lui-même, tandis qu’il fume sa pipe près d’une fenêtre.
Selon le jeune réalisateur Nicolas Legendre, le plein potentiel de cette technologie passe par cet aspect d’interaction avec l’œuvre. «Le spectateur ne peut plus être passif comme dans une salle de cinéma. Avec cette technologie, tu as un certain contrôle sur ce que tu veux faire», explique-t-il. Bien qu’Oculus soit une jeune technologie, Legendre ajoute que «bien exploitée, [il est] pas mal certain que ça attirerait plus de gens en salle que la technologie 3d, parce que ça ajoute une toute nouvelle perspective». Même si cette nouvelle technologie semble plutôt être de connivence avec l’industrie du jeu vidéo, force est d’admettre qu’elle offre une magnifique option au monde du cinéma.
La ville de Montréal semble vouloir emboîter le pas dans le développement et l’exploitation des technologies reliées au monde numérique. L’exposition Kaléidoscope est en quelque sorte la continuité du projet du «Printemps numérique», dont l’objectif est de «confirmer et de consolider la place de Montréal comme capitale dans les arts numériques». La technologie de la réalité virtuelle fascine et inspire les artistes du grand écran, comme en témoigne la collaboration de Robert Lepage avec l’auteur et écrivain Alberto Manguel pour créer l’exposition La bibliothèque, la nuit (du 27 octobre 2015 au 28 août 2016 à la Grande bibliothèque de Montréal), dans laquelle ils exposent les bibliothèques les plus somptueuses du monde.
Chose certaine, Oculus est dans le paysage pour y rester. Le groupe Facebook a par ailleurs procédé, en 2014, au rachat de cette technologie pour la somme de 2 milliards de dollars. L’objet ne nécessite plus vraiment de promotion, et bien que les casques de réalité virtuelle soient encore en production (la commercialisation est prévue pour 2016), Oculus est déjà l’outil de prédilection de certains réalisateurs qui ont maîtrisé l’art du 360 degrés.
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Kaleidoscope était présentée au congrès MUTEK_IMG du 1er au 3 octobre.
Article par Julien Denis.