Cette confusion sera superbe tourne autour du récit d’Huguette Gaulin, une poètesse du 20e siècle. Le roman de Martin Talbot met en scène plusieurs personnages dont les chemins se croisent, tous liés d’une manière ou d’un autre à cette autrice au destin tragique. La narration est partagée entre les différents personnages, ce qui crée un effet d’étourdissement chez les lecteur·ice·s. L’histoire tourne toutefois principalement autour de Benoit, qui réalise un film concernant le décès d’Huguette Gaulin – qui s’est enlevée la vie en s’immolant par le feu – dont Sarah, une jeune comédienne de 25 ans, aspire décrocher le rôle principal. Celle-ci pousse d’ailleurs jusqu’aux extrêmes son incarnation d’Huguette Gaulin. D’autres personnages, comme Daniel et Nick, ont aussi leur place dans ce récit déconcertant, qui unit une multitude de personnages touchés de près ou de loin par des troubles de santé mentale.
Cette confusion sera superbe est un roman dont le fond et la forme se rejoignent parfaitement. L’auteur crée une confusion au sein même de ses personnages, mais aussi dans le chevauchement rapide des narrations. Ainsi, les narrateur·ice·s incluent des analepses et des ellipses temporelles à leur récit. Ce désordre, parfaitement maitrisé et structuré par l’auteur, semble refléter la confusion créée par la psychose : certains extraits rappellent parfois l’obsession, parfois la perte de contact avec la réalité. En effet, Martin Talbot réussit à entremêler les réalités difficiles, comme les crises psychotiques et les moments d’instabilité émotionnelle, que vivent les individus aux prises avec un trouble psychologique. En démontrant toutes les facettes des troubles de santé mentale, il réussit à en faire ressortir les forces qui en découlent, telles que la créativité artistique et la maitrise de la poésie. Tout au long du récit, l’auteur adresse toujours de manière respectueuse les obstacles vécus par les personnes schizophrènes et leurs proches.
Bref, j’ai apprécié cette lecture qui nous renseigne de manière intéressante sur la poètesse Huguette Gaulin ainsi que sur les impacts que peut causer un trouble de santé mentale. D’ailleurs, les vers de la poétesse ont été publiés dans le recueil Lecture en vélocipède en novembre 1972, soit quelques mois après sa mort tragique. L’autrice montréalaise aurait été atteinte d’un trouble de santé mental, probablement de la schizophrénie. Sa mort sur la place publique a suscité beaucoup de réactions. Luc Plamondon a d’ailleurs rendu hommage à l’artiste dans sa chanson Le monde est fou en s’inspirant de la note retrouvée à ses côtés : « Vous avez détruit la beauté du monde ».
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Martin Talbot, Cette confusion sera superbe, STANKE, 2022.
Article rédigée par : Mégane Therrien
Suicide Action Montréal / Services en santé mentale de Montréal