Compétition destinée aux virtuoses du cirque âgés de moins de vingt-cinq ans, le Festival mondial du Cirque de demain, à Paris, fait rayonner le talent d’artistes circassiens de partout à travers le monde. Quand on dit « Montréal, métropole culturelle », on ne pense pas toujours « Montréal, ville de cirque ». Et pourtant, grâce au Cirque du Soleil, et plus récemment au Cirque Éloize et aux Sept doigts de la main, la communauté internationale n’a aucun mal à lui reconnaître ce titre. N’oublions pas non plus la contribution de l’École nationale de cirque et celle des troupes québécoises de talent qui se produisent ici comme à l’étranger pour perpétuer la tradition de cet art. Si bien, que quand Alain Pacherie, président du festival, présente l’édition spéciale de ce festival, il ne se gêne pas pour définir fièrement Montréal comme la « capitale du cirque ».
À la TOHU, mardi soir, huit lauréats ont présenté à tour de rôle le numéro qui leur a valu un prix à une édition antérieure du festival. Le tout s’est déroulé devant un public conquis, aussitôt qu’eu pris fin le brillant numéro d’ouverture des élèves de l’École nationale de cirque de Montréal. Si j’avais pu me le permettre, j’aurais ri avec autant d’éclat que le bambin ayant arraché un fou rire à Morgan, le jongleur-charmeur. Un beau moment qui ne ment pas : l’humour opère avec brio, véritable ligne directrice de ce spectacle aussi compartimenté que complet, parce que regroupant différents styles et disciplines.
Une trentaine de minutes avant la représentation, le maître de cérémonie, le grand Calixte de Nigremont, improvise déjà avec grâce pour amuser la salle. Personnage tenant quelque peu du cliché, il fait revivre le cirque de l’époque des chapiteaux ambulants, alors que les artistes, à la suite de ses interventions, innovent tous dans leurs disciplines. Si les jongleurs font rire les petits, Calixte de Nigremont y va de son talent d’orateur et de sa maîtrise de la langue française pour faire rigoler les plus vieux en faisant allusion à l’actualité montréalaise, ou encore en taquinant les artistes sur leurs nationalités divergentes. Il était une fois la rivalité franco-belge…
Ce couple belge, qui, justement, se fait attendre après avoir présenté trois courts entrenuméros où Fred, complètement dingue, appelle l’adorable Bert à risquer son entrejambe, sa tête, sa vie et même celle du public. Risques calculés, minutie, concentration. Puis un admirable numéro de trapèze Washington, qui se fait la tête en bas, à toute hauteur. Ce rendez-vous culturel, qui regroupe des artistes de la relève venus d’Allemagne, de Belgique, de France, de Suisse, de Chine et de Tanzanie, déploie le talent de la relève mondiale, sans toutefois se faire la vitrine des différentes cultures de chacun. Certes, on reconnaît le chinois Ba Jianguo à son costume traditionnel et à son accompagnatrice qui joue de la harpe chinoise par-dessus les arrangements sonores de l’orchestre. On devine l’origine des Tanzaniens, contorsionnistes vêtus d’un costume de léopard moulant, mais on ne saurait distinguer les autres nationalités seulement par leurs traits.
Les arrangements sonores et les éclairages, très actuels, donnent un ton plus uniforme au spectacle, qui n’aurait pas souffert d’un peu plus de petites mises en scène comme celles de Bert et Fred afin de démontrer la complémentarité des disciplines circassiennes. À l’image de la compétition, les numéros défilent à un rythme effréné, les uns après les autres, laissant le spectateur juger de celui qu’il préfère. Gagnant de la médaille d’or de l’édition 2012 du festival, Ba Jianguo, a médusé le public en faisant voler sa toupie à la manière d’un diabolo. Gracieux et agile, l’artiste autodidacte a débuté dans la rue avant de joindre la troupe Acrobatique de Shanghai.
Avec les succès radio d’aujourd’hui, le numéro des Starbugs réinvente le rôle du clown et se sert justement, des références du public pour le surprendre. Après tous les numéros époustouflants des athlètes précédents, les clowns, pourtant des plus talentueux, sont drôlement accueillis. Dans leur numéro, on attend dès le début d’être impressionnés par une prouesse acrobatique, mais c’est plutôt l’utilisation qu’ils font des effets sonores, des costumes et des accessoires qui leur valent des applaudissements des plus chaleureux.
Réchauffé par les numéros de Jianguo, du duo de main à main allemand (où Chris est pratiquement deux fois plus grand qu’Iris), des apparitions marquées de Bert et Fred, puis des Starbugs, le public rit de plus belle aux mimiques de Morgan, alors qu’il fait mine de s’excuser d’échapper ses balles de jonglerie. Aussi en l’air, le numéro de trapèze ballant et d’échelle de corde de l’Allemande Lisa Rinne a de quoi empêcher les spectateurs de respirer, chute après chute. Le spectacle de se termine avec la prestation de Nathalie Enterline, des États-Unis et médaillée d’or du 7e festival. Le spectateur ne peut que sourire devant sa fougue et son interprétation réussie de Chaplin, par lesquels elle achève de clore un spectacle qui en met tellement plein la vue que l’on ne sait plus trop quoi en dire.
Festival mondial du Cirque de demain (Édition spéciale), à la TOHU du 19 février au 3 mars 2013. Direction artistique Pascal Jacob.
Article par Catherine Paquette.