Si vous naviguez souvent sur les réseaux sociaux francophones, vous avez très probablement eu un face-à-face avec un comic strip d’Alex Lévesque. Depuis 2016, l’humoriste originaire de Baie-Comeau publie plusieurs fois par semaine un « épisode » de Dessine Bandé, un webcomic composé de plus de 650 courtes vignettes humoristiquement absurdes, stylistiquement minimalistes et, soyons honnêtes, addictives à lire. Son sens de l’humour, auquel s’ajoute un strict rythme de publication, a non seulement attiré l’attention 170 000 lecteur·ice·s, mais aussi celle du groupe média montréalais Urbania, puis celle de la maison d’édition Front Froid. C’est dans la collection « Nouvelle Adresse » de cette dernière que Lévesque publie en novembre 2023 Dessine Bandé : le livre, un recueil qui réunit ses meilleures vignettes.
Le ton de l’œuvre est donné dès la première page. Le comic dépeint un groupe de musique à la recherche d’un « nom de band cool ». Songeur, le claviériste lève les yeux au plafond et son regard croise un détecteur de fumée sur lequel on peut lire « smoke detector ». À la case suivante, le claviériste déclare « les gars, je l’ai! ». Avec ce setup, le lectorat s’attend à ce que le nouveau nom du groupe soit « Smoke Detector » ou quelque chose dans ce genre. Mais Lévesque détourne cette attente à la dernière case, qui montre un théâtre annonçant une performance des « P’tits ronds en plastique accrochés su’ l’plafond[2] ». Le message de cette première vignette est clair : laissez vos attentes sur le bord de la porte parce qu’elles seront fracassées dès l’introduction. Les blagues iront à un endroit à la fois surprenant et évident. Elles vous feront sourire, secouer la tête en pensant « c’est donc ben con », avant de tourner la page avec anticipation. C’est cette réaction qui explique le succès de Dessine Bandé, le webcomic comme le recueil papier. Le mot qui me vient en tête pour le décrire est « simple », et je mets dans cette description toute l’affection et l’admiration que j’ai pour l’œuvre de Lévesque. Dans la préface, il mentionne avoir commencé Dessine Bandé parce qu’il voulait apprendre à faire des blagues[3] et je pense sincèrement qu’il y est arrivé.
Je tiens aussi à mentionner l’évidente progression de son style artistique. Bien qu’il conserve un style minimaliste, Lévesque prend confiance au fil du temps : ses traits sont plus assurés, les détails sont plus présents et les personnages, même si iels gardent généralement leur tête ronde et chauve, sont de plus en plus diversifiés. En faisant le choix de ne pas placer ses vignettes en ordre chronologique, Lévesque choque son lectorat en lui faisant réaliser l’ampleur de son évolution artistique et il en va de même avec son sens de l’humour.
Lecture légère, agréable et amusante, Dessine Bandé est parfaite pour commencer l’année sur une note positive. Lisez-le dans le confort de votre salon, sur un banc dans un parc ou pendant un long trajet d’autobus, peu importe, pourvu que vous le lisiez. Il en vaut la peine.
[1] Alex Lévesque, « Alex Lévesque présente Dessine Bandé: le livre », [vidéo], 2023, en ligne, https://www.instagram.com/p/CygDaadLLcM/, consulté le 1er janvier 2023.
[2] Alex Lévesque, Dessine Bandé, Montréal, Front Froid, coll. « Nouvelle Adresse », p. 7.
[3] Ibid., p. 5.
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Lévesque, Alex, Dessine Bandé, Montréal, Front Froid, coll. « Nouvelle Adresse », 2023, 155 p.
Lévesque, Alex, « Alex Lévesque présente Dessine Bandé: le livre », [vidéo], 2023, en ligne, https://www.instagram.com/p/CygDaadLLcM/, consulté le 1er janvier 2023.
Article rédigé par Audrée Lapointe