J’étais au pub l’Adversaire avec l’intention de jouer à des jeux de société une bonne partie de la soirée, puis la bande-annonce du film 1995 de Ricardo Trogi est passée à la télévision devant mes yeux. Après environ deux secondes et quart, mes plans de soirée venaient de changer. Je suis partie vers le cinéma le plus proche pour la prochaine représentation du film. En plus, le film a déjà atteint un million de dollars au box-office! Il a pris l’affiche au Québec le 31 juillet 2024 dernier.
Connaissant les œuvres autobiographiques précédentes réalisées par Ricardo Trogi (1981, 1987, 1991), j’étais pas mal certaine que j’allais rire. Et comme de fait, cette comédie est encore une fois bourrée de sarcasme, de familiarité et d’humour de la part de tous les personnages. Ça nous laisse un sourire étampé dans le visage.
Ainsi, le film commence avec Ricardo (Jean-Carl Boucher), 24 ans, qui essaye de passer à travers une « défaite » : il a abandonné son rêve d’être cinéaste et il travaille illégalement à vendre des livres scolaires. C’est alors qu’il reçoit un coup de téléphone de Radio-Canada pour l’émission télévisée « la Course destination Monde édition 1994-1995 ». On lui dit qu’il s’est qualifié pour la compétition de jeunes réalisateurs parcourant le monde pour faire des courts-métrages. Réussissant à peine d’entendre la voix de celle qui annonce la bonne nouvelle à Ricardo, notre attention se tourne vers la mère, Claudette, jouée par la fameuse Sandrine Brisson. Comme dans les trois derniers films, cette actrice continue de répandre son énergie avec sa voix aiguë et agitée. Elle étire nos joues de rires. Elle a encore une fois été mon coup de cœur parmi les personnages. C’est le genre de mère poule semi- sévère qui peut avoir l’air rude avec sa voix rauque, mais on ressent aussitôt la tendresse de son rôle.
D’ailleurs, la narration faite par Trogi lui-même sert vraiment de dispositif comique pour nous transmettre son histoire. Nous sommes témoins d’apartés, de ses bulles au cerveau, de son récit, de sa perspective, de son ironie, de sa vision de la vie, etc. Après une entrevue assez mémorable due à la nervosité comique de Ricardo et un dialogue divertissant, il se fait finalement « accepté » par « le monde des artistes » et se qualifie pour la compétition. L’aventure commence à Amsterdam en faisant un court-métrage sur un barbier qui a été très bien reçu au Québec : les attentes pour le prochain sont hautes.
La course se poursuit principalement en Égypte. On se voit transporté dans le processus de création d’un cinéaste, la fabrication pour arriver à produire un objet d’art. C’est dans l’avion vers le Caire que Ricardo fait une rencontre spéciale avec un prénommé Yunnis (Sadi Janho), lui affirmant qu’il a une idée de film pour lui. Donc, c’est le lendemain à l’aube que Ricardo se fait réveiller par Yunnis et il embarque dans l’auto optimiste. Toutefois, Ricardo ne sait absolument rien sur ce qu’il s’apprête à filmer. Une amitié se crée au travers des folies de Yunnis et l’espoir de Ricardo de remporter la compétition.
Après une brève tentative douteuse de l’idée de film de Yunnis, Ricardo se tanne et trouve sa propre idée. Convaincu de faire son court-métrage sur l’excision, il défie les normes égyptiennes qui interdit telle chose et décide de continuer son projet. Que ce soit la recherche d’une actrice qui sait bien danser ou une caméra fracassée jusqu’aux douze travaux d’Astérix pour obtenir sa nouvelle caméra aux douanes (l’enfer bureaucratique) : on nous en fait voir de toutes les couleurs avec les mésaventures et les niaiseries qui se passent lorsqu’il fait le tour du monde.
De surcroît, Jean-Carl Boucher réussit à nous faire voyager en même temps que lui dans le film à travers ses hauts et ses bas. Par ailleurs, ce qui m’a surpris du film, c’est qu’il m’ait fait pleurer. J’ai même versé des larmes pendant le trajet de retour dans la voiture. Les quelques scènes en lien avec son père Benito (Claudio Colangelo) sont vraiment touchantes. On comprend que Benito, qui travaille dans un restaurant, aurait lui aussi voulu réaliser son rêve d’être musicien. Donc on voit le regret, la peine, mais surtout la fierté et la joie qu’il a pour son fils qui lui, arrive à réaliser son rêve. Je ne vous dis pas ses derniers mots à la toute fin du film, mais c’est pas mal cute. Allez le voir! Ça en vaut la peine. Vous tomberez sous le charme de cette œuvre italo-québécoise.
Trogi, R. (réalis.). (2024, 31 juillet). 1995 [Film]. Immina Films.
Crédits : Immina Films