La nouvelle vague roumaine. Cela ne vous dit rien? Les étudiants en Fine Arts de l’Université Concordia offrent au public cinéphile l’occasion de découvrir ce mouvement cinématographique émergent avec la série de projections gratuites From Under the Shadow. La première séance avait lieu samedi dernier avec le documentaire The Autobiography of Nicolae Ceausescu, réalisé en 2010 par Andrei Ujica. Les prochaines projections auront lieu les samedis 3 et 10 décembre au pavillon J-A de Sève sur le boulevard Maisonneuve.
Les cinéastes de la nouvelle vague roumaine ont tous vécu pendant le régime autoritaire de Nicolae Ceausescu. Les œuvres de ces réalisateurs ont été largement influencées par la société de jadis, sous le régime du parti communiste au pouvoir entre 1965 et 1989. Avec The Autobiography of Nicolae Ceausescu, Andrei Ujica propose un documentaire intimiste sur la vie du dictateur, composé uniquement d’images d’archives nationales et d’enregistrements vidéo personnels de Ceausescu. Sans narration, ni contextualisation. Pas de chance pour les néophytes de la sphère géopolitique des années 70 et 80, puisqu’aucune description des lieux ou des intervenants principaux n’est fournie. Bien souvent, ils ne sont pas du tout mentionnés. Le spectateur est laissé à lui-même pour situer ce qu’il voit. Il n’y a aucune logique spatio-temporelle non plus : le film bondit d’un événement à l’autre sans souci de continuité chronologique.
Malgré cet apparent désordre, le documentaire est tout de même structuré en différents cycles qui présentent un discours, une visite officielle, une parade et une anecdote de la vie privée du leader communiste. Le film met l’accent sur tout le système de propagande autour de ces activités. De la propagande pas très crédible, assez ridicule pour que le spectateur qui ignore l’histoire de la Roumanie sous Ceausescu devine la façade. Comme le mentionnait le professeur Max Bergholz en introduisant le documentaire, Andrei Ujica cherche à nous plonger dans le self-made world du dictateur. Un monde superficiel où tout va pour le mieux, où le chef d’État est adulé partout.
Si cette illustration de la propagande est d’abord intéressante, elle devient par la suite, cycle après cycle, insupportable. Le montage semble en effet volontairement désagréable, tant au niveau des images que du son. Par exemple, la bande sonore de certaines séquences est uniquement composée d’un vacarme assourdissant sans aucun lien avec l’image. Ou encore, alors que la grande majorité des bandes vidéo sont de très bonne qualité, Ujica inclut de courts plans flous, mal cadrés, sans son, qui auraient facilement pu être coupés des quasi trois heures que dure le long-métrage. Ces procédés ne sont pas sans rappeler Le film est déjà commencé (1951) de Jacques Lemaitre, qui se voulait également insupportable.
Si The Autobiography of Nicolae Ceausescu est un documentaire qui ne tente pas d’informer son public sur l’histoire de la Roumanie, il propose plutôt une réflexion sur l’outil de propagande. Malheureusement, les cycles qui structurent le film sont extrêmement redondants. Les passages les plus intéressants figurent parmi les plus courts, comme lorsque Ceausescu visite les États-Unis, l’Angleterre, la Chine ou encore la Corée du Nord. Lors de ces scènes, le spectateur peut se questionner sur les différentes formes que peut prendre la propagande, même dans les pays occidentaux.
Bref, malgré cette première projection un peu décevante, la prochaine séance prévue pour le samedi 3 décembre promet, alors que 4 Month, 3 Weeks, and 2 Days, lauréat de la Palme d’Or en 2007, sera présenté.
Toute la programmation ici : Fine Arts Students Alliance (FASA)
Article par Francis Dufresne.