La période des fêtes est bien entamée, guirlandes et rencontres chaleureuses sont au rendez-vous. Le décompte est finalement arrivé à zéro, nous promettant soirées festives et visite surprise, toutes les portes du calendrier de l’avent sont maintenant ouvertes. Il reste toutefois quelques journées avant la fin de cette belle année. Pour recharger votre batterie sociale et vous permette de prendre un peu de temps pour relaxer, je vous propose d’ouvrir les portes du calendrier de l’après qui suggère un titre par jour jusqu’au Nouvel An. C’est parti!
25 décembre : 24 jours pour survivre au réveillon d’Audrée Archambault
La période des fêtes n’est pas complète sans la lecture d’une excellente romance de Noël. Cette année, c’est le premier roman jeune adulte d’Audrée Archambault qui a connu un énorme succès et avec raison! Elle nous présente Mélodie, jeune étudiante – bientôt diplômée – un brin anxieuse et control freak, comme sa mère. La jeune femme fait sans cesse des listes pour planifier ses journées. Toutefois, il y a une limite à ce qu’on peut prévoir et Mélodie l’apprendra à la dure. Alors qu’elle s’envole pour un stage à Sainte-Avoine-de-la-Bourrasque, elle se retrouve prisonnière de cette petite ville pour une période indéterminée. Complètement dépaysée par ce petit village très loin de son quotidien dans la métropole, elle doit mettre ses listes de côté pour plutôt apprendre à vivre un jour à la fois. N’ayant que très peu de réseau, Mélodie tente de gérer tant bien que mal la fin de son stage, mais surtout la préparation du réveillon, qui est une grande source d’angoisse chaque année.
J’ai adoré cette histoire légère qui m’a à la fois fait rire aux éclats et essuyer quelques larmes. Le personnage de Mélodie est tout à fait attachant et j’ai bien aimé la suivre dans cette aventure rocambolesque. Bref, un roman qui nous accueille dans un coin de pays chaleureux et qui nous permet de croire aux miracles de Noël.
26 décembre : Des jardins secrets remplis d’orties de Dominique Bertrand
Dominique Bertrand a publié cette année un l’œuvre Des jardins secrets remplis d’orties sous la forme de roman choral. Bien qu’elle ait une ambiance des fêtes en arrière-plan, l’œuvre se concentre plutôt autour du thème de la vengeance et du proverbe « jamais mieux servi que par soi-même ». Nous rencontrons d’abord Clara et Richard, deux âmes blessées qui se retrouvent toutes deux au motel Thank God un peu par hasard. Ils y rencontrent également Symone, une femme enceinte victime de violence conjugale qui y travaille. Chacun des personnages est à un tournant de sa vie et nous fait part ses réflexions quant à ses prochaines décisions. Ces trois personnages développent rapidement une relation de confiance puisqu’ils semblent se reconnaitre dans leur malheur respectif. Leur destin est définitivement lié lorsque Symone trouve un vidéo incriminant à la fois son mari agressif, le maire et le chef de police.
L’histoire est à la fois violente puisque les personnages se font justice eux-mêmes et émouvante, car ils sont tous très résilients. Un message d’espoir transperce l’œuvre malgré quelques passages plutôt gores. En somme, un roman qui fait croire en l’existence du karma!
27 décembre : Selfies : Autoportraits d’enfants du siècle, dirigé par Kiev Renaud
Pour ce troisième jour du calendrier de l’après, je vous suggère un collectif publié chez Cheval d’août en novembre dernier. Selfies propose les courts textes de trente auteur·rice·s au sujet de l’apparence physique. Iels se sont prêté·e·s au jeu en revisitant les descriptions corporelles loin des clichés. En effet, on se concentre plutôt sur les mimiques, les traits passés de génération en génération, les photos, les reflets dans le miroir ou leur absence, le passage du temps sur le corps, un trait spécifique du visage. Nous examinons de près les traits qui rendent vulnérable, ceux qui font en sorte que nous respectons ou non les standards de beauté de la société. Chaque auteur·rice·s a une approche originale pour aborder cette thématique, une perspective différente pour détailler le corps. J’ai été contente d’à la fois voir apparaitre le nom de certain·e·s auteur·rice·s qui se sont particulièrement démarqué·e·s au cours de l’année et découvrir de nouvelles plumes. J’ai personnellement eu un gros coup de cœur pour les textes de Simon Boulerice et Fannie Demeule, bien que plusieurs sont magnifiquement construits.
Cette œuvre fait beaucoup réfléchir sur la vision que nous pouvons avoir de nous-mêmes, bien souvent un peu trop sévère.
28 décembre : Piisim Napeu de Georges Pisimopeo
Cette œuvre autochtone est une lecture à la fois douce et difficile. Elle permet un retour aux sources, à l’importance d’écouter et de remercier la nature pour tout ce qu’elle nous offre. Georges Pisimopeo nous permet de l’accompagner dans ses fragments de souvenirs. Nous plongeons avec lui dans le quotidien difficile des communautés autochtones, dans lesquelles les coutumes réussissent à persister malgré la violence du colonialisme. L’auteur s’exprime à cœur ouvert en nous entrainant dans ses souvenirs de racisme, de pensionnats, de violence conjugale et d’abus d’alcool. Une résilience inouïe transperce l’œuvre par l’entremise de l’importance des rêves, de la médecin naturelle, du savoir ancestral passé de génération en génération et de réconciliation.
Un petit livre qui fait beaucoup réfléchir sur les conséquences désastreuses entrainées par la colonisation.
29 décembre : Habiter en beauté, ces lieux qui nous font du bien de Pierre Thibault et Catherine Perrin
Aujourd’hui, nous vous suggérons une œuvre totalement hors du commun puisqu’il s’agit d’un dialogue entre l’animatrice Catherine Perrin et l’architecte Pierre Thibault. Ceux-ci nous invitent à visiter avec eux des lieux que Pierre Thibault a conçu au courant de sa carrière. Ce livre tout en rondeurs est en soi absolument magnifique, chaque détail semble réfléchi tout comme les œuvres architecturales de Pierre Thibault. Chaque chapitre est dédié à un endroit qui nous est décrit non seulement par son aspect physique, mais aussi par toute l’histoire qui l’accompagne. Des images d’un joli mélange entre le sketch et l’aquarelle traversent le texte, ce qui en fait une œuvre à la fois orale et artistique, en plus d’être littéraire. Il est facile de s’imaginer chaque construction à partir des descriptions précises que nous en obtenons. D’ailleurs, les explications permettent de voir à quel point chaque détail est réfléchi jusqu’à ce qu’il convienne parfaitement à l’idée préconçue et au concept du projet. Nous nous promenons donc entre installations éphémères, écoles, résidences et jardins pour découvrir leur composition surprenante.
Dans cette œuvre, Pierre Thibault est notre conteur, Catherine Perrin nos yeux.
30 décembre : Le destin c’est les autres de Claudine Bourbonnais
Dans cette autofiction, nous suivons Claudine Bourbonnais à trois moments très précis de sa vie : l’Université en Angleterre en 1988, un voyage de six semaines au Caire, un retour surprenant dans ses souvenirs alors qu’elle revient à Londres des années plus tard. L’autrice nous raconte trois souvenirs inspirés de moments marquants de sa vie. Nous débutons par une expérience déroutante alors que l’une de ses connaissances est arrêtée dans leur résidence étudiante à la suite de l’agression d’une étudiante. L’autrice nous plonge dans la réalité de cette époque, alors qu’il y a deux clans : les étudiant·e·s et les habitant·e·s de la région. Nous voyageons ensuite en Égypte où une voyante annonce à Claudine que sa vie sera bouleversée lorsqu’elle atteindra la cinquantaine. L’autrice illustre les conflits politiques et religieux qui créent une tension énorme au sein de la population. C’est une période accrue d’espionnage, où tous·tes se méfient les un·e·s des autres. Quelques décennies plus tard, Claudine reçoit bel et bien un courriel qui chamboule sa vie. (Risque de divulgâcheur si vous poursuivez votre lecture au-delà de ce point.) Effectivement, alors rendue journaliste et présentatrice chez Radio-Canada, Claudine apprend que l’un de ses collègues de l’université est l’un des plus recherchés au pays puisqu’il fait partie d’une organisation criminelle. Les ami·e·s de l’université se donnent alors rendez-vous à Londres où ils fouilleront leurs souvenirs à la recherche d’indices qu’ils auraient laissés passer par insouciance ou naïveté.
Un mystère enveloppe les deux premières parties de l’œuvre et laisse présager une annonce troublante, la troisième partie clôt le livre en lui faisant prendre tout son sens. C’est une œuvre politique tout à fait intrigante!
31 décembre : Je parlerai des amélanchiers de saint-maxime-du-mont-louis de Mathieu Hachebé
Pour ce dernier jour du calendrier de l’après, nous vous proposons la découverte de la nouvelle œuvre de Mathieu Hachebé publiée cette année chez Maison en feu. Cette œuvre faite de fragments nous entraine dans un univers peu commun, celui des arbres. En effet, l’auteur s’adonne à la reproduction d’arbres fruitiers et ses connaissances sont l’essence de l’œuvre. Dans cette œuvre originale, un groupe d’ami·e·s loue une maison ensemble. Le livre débute d’ailleurs par la reconstruction de la serre, améliorée suite à son effondrement. Tout au long de ma lecture, j’ai été persuadée qu’il y avait là une jolie métaphore. La propriétaire de la maison, Diane, est complètement étouffante, ce qui crée énormément de tensions et amène finalement les ami·e·s a se séparer. Nous les suivons au gré des saisons et de leurs décisions de jeunes adultes. C’est une œuvre qui transpire l’amour de la nature!
7.6.5.4.3.2.1 : L’équipe de l’Artichaut vous souhaite une merveilleuse nouvelle année!
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Archambault, Audrée, 24 jours pour survivre au réveillon, Montréal, Fides, 2023, 304p.
Bertrand, Dominique, Des jardins secrets remplis d’orties, Montréal, Flammarion Québec, 2023, 256p.
Bourbonnais, Claudine, Le destin c’est les autres, Montréal, Québec Amérique, Coll. « iii », 2023, 152p.
Hachebé, Maxime, Je parlerai des amélanchiers de Saint-Maxime-Du-Mont-Louis, 2023, La maison en feu, 200p.
Perrin, Catherine et Pierre Thibault, Habiter en beauté, Montréal, La Presse, 2023, 272p.
Pisimopeo, Georges, Piisim Napeu, Wendake, Hannenorak, 2023, 120p.
Renaud, Kiev (dir.), Selfies, Montréal, Cheval d’août, 2023, 120p.
Photo de couverture : Andreea Radu